25/03/2009

La vie que j'ai menée / M'empèche de me suicider (B.C.)

"Et la Vie, aussi laid soit son visage, mérite bien qu'on s'accroche trois ou quatre jours. Vous croyez qu'on va y arriver?"

"Toute activité créatrice complexe, comme la peinture, la poésie, le braquage de banque, la prise de pouvoir, te mène au point où le miracle et le danger se ressemblent comme des frères siamois. Ca ne marche pas toujours comme sur des roulettes, mais quand ca marche, la vie vaut vraiment le coup."

"Pour un homme qui meurt, la mort est toute la réalité; pour les autres, ce n'est que de la malchance ou un mauvais moment à passer."

"Un mauvais trip? Ce pays tout entier, cette planète est dans un mauvais trip, l'ami. Mais on t'arrêtera si tu avales une pilule."

"- Je crois tout de même que la révolution nous débarasserait d'un chié paquet de merde.
- Qu'elle gagne ou qu'elle perde, c'est du kif. La révolution nous débarassera d'un paquet de bonnes choses et d'un paquet de mauvaises. l'Histoire se fait très lentement. Moi, j'irai m'installer dans un arbre.
- Rien de tel pour observer.
- Ouais. Reprends donc de la bière."

"On ne manque pas de sociologues à faible quotient intellectuel aujourd'hui. Pourquoi j'en ajouterais, avec mon intelligence supérieur? On a tous entendu ces vieilles femmes qui disent: "Oh! comme c'est AFFREUX cette jeunesse qui se détruit avec toutes ces drogues! C'est terrible!" Et puis tu regardes la vieille peau: sans dents, sans yeux, sans cervelle, sans âme, sans cul, sans bouche, sans couleur, sans nerfs, sans rien, rien qu'un bâton, et tu te demandes ce que son thé, ses biscuits, son église et son petit pavillon ont fait pour ELLE. Et les vieux se mettent parfois dans une colère noire contre les jeunes: "Bon sang, j'ai travaillé DUR toute ma vie!" (Ils prennent le travail pour une vertu, mais ca prouve seulement qu'un type est taré.) "Les jeunes veulent tout pour RIEN! Ils s'abîment la santé avec la drogue, ils s'imaginent qu'ils vont suivre sans se salir les mains!"
Puis tu LE regardes:
Amen.
Il est seulement jaloux. Il s'est fait enculer, on lui a piqué ses plus belles années. Il meurt d'envie de baiser. S'il tient jusqu'au bout. Mais il ne peut plus. Donc, maintenant, il veut que les jeunes souffrent comme il a souffert.
La plupart du temps, c'est de ca qu'il s'agit. Les défoncés en font trop à propos de leur sacrée défonce et le public pareil avec l'usage de la drogue. La police se remue et les défoncés se font pincer, et ils se prennent pour des martyrs, tandis que l'alcool reste légal, tant que vous ne dépassez pas la mesure et que vous n'êtes pas pris dans la rue et mis en prison. Quoi que vous donniez à la race humaine, elle s'écorchera avec et vomira dessus. Si on légalisait la féfonce, on se sentirait un peu mieux aux Etats-Unis, mais pas tellement. Tant qu'il y aura des tribunaux, des prisons, des hommes de loi et des lois, les gens se défonceront.
Leur demander de légaliser la défonce, c'est un peu comme leur demander de beurrer les menottes avant de nous les passer. Quelque chose encore vous intrigue pourquoi ce besoin de drogue ou de whisky, de fouets ou de cuirs, d'une musique qui gueule si fort qu'elle emêche de penser, d'asiles, de chattes mécaniques et de 162 matchs de base-ball par saison, du Vietnam, d'Israël ou de la peur des araignées, de ton amour qui rince son dentier jauni dans l'évier avant de baiser?
Il y a des réponse de fond et il y a le petit bout de la lorgnette. Nous nous amusons toujours avec le petit bout de la lorgnette parce que nous ne sommes pas assez mûrs ou assez vrais pour dire ce que nous voulons. Nous avons cru pendant des siècles que c'était le christianisme. Nous avons jeté les chrétiens aux lions puis nous avons laissé les chrétiens nous donner aux chiens. Nous avonsc ompris que le communisme remplissait un peu l'estomac de l'homme de la rue mais qu'il ne changeait guère son âme. Maintenant nous jouons avec les drogues, comme si elles devaient ouvrir des portes. L'Orient a connu la drogue, bien avant la poudre à canon. Ils ont compris qu'ils souffriraient moins et qu'ils mourraient plus. Se défoncer ou ne pas se défoncer.
"On va à M-a-li-bouuu, mec, ouais, on va à Malllll-i-bOOUUU!"
Vous permettez que je me roule un peu de Bull Durham?
"Hé toi, tu veux une taf?"

Charles BUKOWSKI, Nouveaux contes de la folie ordinaire